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14 December 2009

Terre-Neuve

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Octobre 2005 – 6868,16 kilomètres plus loin

Hé oui, c'est fini.

Cette traversée vogue encore dans nos cœurs tendres de voyageurs. On se souvient de notre départ à la fin mai, anxieux de savoir si nos mois d'entraînement étaient suffisants. Nous nous demandions si l’équipement que nous avions magasiné à la course était complet, tout en essayant de finir nos cours en beauté. Nous n'avons pas vu ces deux semaines passer, nos spectacles de fin d’année, nos remises de projets, les dernières rencontres avant de quitter les amis et la famille, que nous étions déjà sur la route en direction de Montréal ou un avion nous emmenait à St. John's, Terre-Neuve. Arrivée tardive en cette ville portuaire, où nous avons passé deux jours avant de prendre la route, nos connaissances d’anglais en poche mâchées à travers les quelques cours pertinents de notre parcours scolaire dans nos régions bien francophones du Québec :

 

31 mai 2005, jour 0, 0km, St. John's (Terre-Neuve)

Bonjour a tous!

Nous sommes bel et bien à St. John's. Le vol s'est bien déroulé, on est arrivé vers 22 h heure locale, alors nous avons demandé où nous pourrions bien dormir à une femme habillée comme si elle pouvait nous aider et après nous avoir donné des prix exorbitants pour des hôtels, elle nous a finalement dit d'aller dormir…

“At your house”
“What!?”
Après trois reprises:
“Hatcher house”
Ah.... d'accord.

Alors nous voilà parti en taxi jusqu'à Hatcher House, les résidences universitaires du Memorial University of Newfoundland, dans une chouette petite chambre. Ce matin, on a monté nos vélos, ça l'a été long, il a fallu rajuster les freins sur le vélo à Mathieu car j'avais trop dévissé une vis, enfin, tout est correct maintenant et nous descendons au centre-ville pour le reste de la journée. Demain, c'est le grand départ!

Au revoir!

Etienne et Mathieu

 

Octobre 2005 – 6724,06 kilomètres plus loin

Le défi des premiers jours se passa à Terre-Neuve. Jours difficiles, l'été n'osait pas débuter, Etienne était un peu malade, les côtes s'enchaînaient une à la suite de l'autre, il y avait le stress de savoir où sont nos limites et nous n'étions pas tout a fait prêt à affronter le vide, des dizaines et des centaines de kilomètres sans population. La sympathie des quelques personnes rencontrées n'arrivait pas a combler ce néant. Le bateau que nous voulions prendre a soudainement paru plus loin que l'on croyait et le plan B de prendre l'autre bateau est tombé à l'eau car il n'était pas encore en opération en ce début juin. Nous nous retrouvons donc sur la route, le pouce dans le vent. Nous ne regrettons pas ce choix, car il nous a permis de rencontrer des gens extraordinaires comme Stephen que nous avons revu avec plaisir lors de notre passage en Alberta. La désolation et la solitude du paysage nous a frappé et nous avons apprécié le bar portuaire en attente du bateau qui allait nous sortir d'ici.

 

Du journal de bord :

@ 2 juin : Nous avons monté à peu près 25 côtes et bien sûr, on les a descendues. Détour de plus de 10 km pour se trouver de la nourriture pour les 3 prochains jours. Première nuit illégale.

@ 3 juin : Journée de décisions et de redécisions. Décision au début d’attendre que le bateau d’Argentia ouvre, le 18 juin, pour partir vers la Nouvelle-Écosse. Finalement, nous irons tout de même à Argentia mais irons à Port-aux-Basques sur le pouce.

@ 4 juin : Nuit horrible et même inexistante.

@ 5 juin : Newfoundland screech pour la province et on s’est fait payé de la bière. On est saoul, pour le reste du voyage, pour le reste de la journée.

 

1 juin 2005, jour 1, 0 km pour l'instant, St. John's (Terre-Neuve)

Allo les copinots.

C'est étrange qu'on vous écrive deux jours de suite, on s'entend que ce ne sera pas toujours comme ça. On est à la station touristique de St. John’s et on a deux heures à perdre. Et oui, on doit faire un check-up des vélos car on a détecté plusieurs problèmes. Rien de grave. On fera notre départ officiel aujourd'hui pareil, mais on roulera bien sûr moins de temps. St. John's est bien sympathique, c'est une toute petite ville environ gros comme Lévis, et il y a même une raffinerie dans le cap, sauf que c'est Irving. On a pu visiter le centre-ville hier, on s'est promené près du port et on a pris une bière sur George Street! Voilà!

À la prochaine!

 

mardi 7 juin 2005, jour 7, 181 km, Sydney (Nouvelle-Écosse)

What the?!?

Bonjour!

Changement à l'itinéraire. Vendredi matin, alors qu'Etienne se vidait les intestins pour une xième fois, Mathieu, craintif, observa les cartes et dit : « We're in big shit, y a plus rien après Whitbourne! » Les grandes villes (c.-à.-d., plus de 500 habitants!) sont espacées de 200 à 300 km. Les offices de tourisme ne sont pas capables de nous donner un guide complet de camping. Le camping n'est pas très populaire ici, surtout pour les tentes. On s'est fait refuser à une place car le camping n'acceptait que les roulottes. On peut accepter et réussir à dormir quelquefois n'importe où, mais il aurait fallu le faire plusieurs fois de suite, sans épicerie et sans douche (on se rappelle ici qu’Etienne se VIDE les intestins).  Il y a des motels, mais ils sont très dispendieux, aucune concurrence oblige, où c’est nous qui a un trop petit portefeuille. On aurait vu que de la forêt.

Les villes sont loin de la transcanadienne, et il faut faire des détours d'une dizaine de kilomètres pour aller se chercher de la nourriture. Alors, un choix s'est imposé. Au lieu de faire les 900 km pour Port-aux-Basques pour le traversier se rendant a North Sydney en Nouvelle-Écosse, nous pouvons prendre un autre traversier plus près, à Argentia, une belle traversée de 14h plutôt que de 6h30. Argentia est situé à 140 km de St. John's, mais le hic, c'est que la première traversée se fait que le 18 juin.

Que faire? L'attendre? On y a pensé. Mais ça aurait été assez long! On a plutôt pédalé une distance équivalente pour se rendre à Argentia, puis nous sommes retourné sur la transcanadienne et nous nous sommes rendus à Port-aux-Basques sur le pouce pour se rendre le plus vite possible en Nouvelle-Écosse. Terre-Neuve, c'est bien joli, mais on ne rencontre personne si on reste sur la transcanadienne, on ne s'imprègne pas de la culture locale. Pour ce qui est de pédaler, il n'y a aucun problème, on réussit bien. C'est pourquoi nous avons décidé de sauver du temps, de l'énergie et de l'argent pour en profiter ailleurs. On ne regrette pas notre passage à Terre-Neuve, on a appris beaucoup, comme le fait que seulement l'est de la province est accessible en vélo et qu'il faudrait avoir beaucoup d’encouragement pour venir s’installer ici! Nous savons que le nord de l'Ontario aura le même degré de solitude, mais nous serons plus prêt à une telle aventure, après avoir pédalé tout l'Atlantique et le Québec, et nous ne pourrons pas modifier notre trajectoire! Maintenant, on prend quelque temps pour se reposer à Sydney et on repartira pour compléter les provinces de l'Atlantique.

Au revoir!

Etienne et Mathieu

 

Meilleur souvenir Etienne : Notre première nuit de camping où nous étions si fiers de notre repas, dont les déchets prenaient la taille d’une conserve de jambon pré-mâché. Il n’en a pas trop fallu pour remarquer qu’il nous faudra plus de nourriture pour avancer…

Meilleur souvenir Mathieu : Notre rencontre avec Stephen, le camionneur qui nous a amené jusqu’à Port-aux-Basques. Les 600 kilomètres du haut de sa cabine étaient formidables, sans oublier la petite soirée au pub du quai du traversier, où une amitié s’est développée… nous le reverons.

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À propos de ce blogue

Canada en vélo - correspondances 2005

14 décembre 2009 - Il y a quatre ans jour pour jour, mon ami Mathieu et moi revenions d’un voyage qui nous a fortement influencé physiquement, socialement, émotivement : la traversée du Canada en vélo, de St. John’s, Terre-Neuve à Victoria, Colombie-Britannique. Dans une époque où les blogues étaient encore peu connus, où le Web 2.0 et réseaux sociaux étaient des termes inconnus, nous communiquions avec nos proches en courriels de groupe, ou newsletter. Dans un but de rééditer ces courriels avant qu’ils ne se perdent dans le néant, sans cacher le désir de me remémorer une étape importante de ma vie et de la faire connaître aux gens que j’ai connus depuis et ceux qui passeront par ce blogue, vous trouverez hebdomadairement, pour les 15 prochaines semaines, une synthèse des correspondances effectuées et de nos aventures, le tout, bien sûr, agrémenté de photos.

Auteur

Etienne Théroux

J'ai commencé mon voyage à Québec, dans une petite banlieue qui m'a vu grandir. J'ai ensuite, entre autre, étudié en arts littéraires, exploré mon pays à dos de vélo, travaillé au pays des kangourous et j'étudie maintenant... en tourisme, à Montréal. Pour moi voyager c'est vivre des expériences, découvrir des gens et des cultures.

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